.. Et au milieu de Mulhouse coulent des rivières


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info rivieres (Ill, Doller) de Mulhouse

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Les cours d’eau de Mulhouse constituent un véritable maillage souterrain dans la cité. La ville est traversée par deux cours d’eau historiques, la Doller et l’Ill, ainsi que par des bras d’eau dont certains ont été enfouis, voire asséchés.


Les grands travaux ont toujours influencé l’urbanisme des villes et Mulhouse en est un exemple vivant. La création de la ville ne trouve-t-elle pas sa source dans la légende d’un moulin qui était situé près de la Porte de Bâle ? Pendant des siècles, la ville a grandi certes, mais elle a aussi connu d’importantes inondations, dues aux nombreuses crues de l’Ill.

Dès 1642, le premier plan recensé fait état de quatre canaux d’eau défensifs qui encerclaient la vieille ville comme une forteresse. Tous étaient dérivés de l’Ill. L’eau était alors utilisée comme rempart. Ainsi le Traenkbach passait derrière l’emplacement de l’hôtel de ville actuel, le Mittelbach au nord de la rue des Trois-Rois tout comme le Karpfenbach (qui servait de viviers à carpes) et la Sinne. Reste que le Steinbaechlein – qui est un diffluent (un bras d’eau qui se sépare de la rivière) de la Doller, se divisait en Dollergraben (qui coulait près de la rue Gutenberg) et en Froschgraben (fossé aux grenouilles), au niveau de l’avenue Kennedy.

Certains cours d’eau étaient aussi des zones de marécages, selon la période de l’année, et donc insalubres. Historiquement, les eaux se séparaient au niveau de la tour du Diable et se rejoignaient près de la tour du Bollwerk. « Beaucoup de fossés ont été recouverts d’abord par des ponts avant d’être comblés pour disposer de plus de place en vue de construction d’usines ou d’habitations », indique Bernard Finck, ingénieur et directeur du service des eaux de Mulhouse.

Un canal de décharge contre les inondations

On apprend par exemple dans le livre d’Eugène Riedweg, Mulhouse, images d’une ville singulière, paru en 1997, que le Mittelbach disparaît lors de la construction des halles en 1864, que la Sinne a été recouverte en 1866. Sous l’occupation allemande, de 1870 à 1914, Mulhouse voit son image profondément modifiée. L’un des derniers grands chantiers est le comblement du cours d’eau de la rue de Bourg, en passant par la rue Guillaume-Tell et à côté de l’hôtel de ville en 1905. « Ces travaux ont été réalisés pour des raisons d’hygiène dans la ville », indique Bernard Finck. Résultat, l’eau a disparu du centre-ville.

Mais le grand chamboulement a eu lieu au cours du XIX e siècle, avec la construction de nombreuses manufactures à travers la ville. La bonne qualité de l’eau de la Doller était une des raisons d’implantation des usines textiles, surtout les teintureries.

Des ponts ont également été construits comme la Nesselbrücke sur le Dollergraben qui permettait aux ouvriers de la fabrique Josué-Hofer, d’accéder à leur usine.

Dès 1846, pour éviter les désastres fréquents causés par les inondations, la municipalité a fait le choix de construire le canal de décharge des eaux de l’Ill pour les dévier dans la Doller, à l’arrière de l’actuel musée de l’automobile. En plus, de nombreux ruisselets alimentaient les différents cours d’eau principaux, près de la rue des Rabbins ou encore dans la Grand-Rue, rue des Tanneurs, près de l’ancienne caserne des pompiers – rue du Sauvage… Ils ont fait longtemps office de dépotoirs (lire la Topographie historique du Vieux Mulhouse de L.G. Werner- 1996).

Les différents cours d’eau sont régulés

Ce fait est corroboré par le plan de 1885, où figurent les cours d’eau de Mulhouse, qui est archivé au service des eaux. « Beaucoup d’entre-eux ont été canalisés ou asséchés. Aujourd’hui, nous régulons les débits des différents cours d’eau souterrains et en surface. Par exemple, le Steinbaechlein qui se sépare de la Doller au niveau du pont d’Aspach (près de Burnhaupt-le-Bas), rejoint l’Ill au niveau du Nouveau Bassin, tandis que la Doller entre dans Mulhouse via Reiningue et au pied du pont de Lutterbach. L’Ill entre dans la ville près de la SACM et se partage, à ce niveau, entre le cours d’eau historique et le canal de décharge. Ce canal traverse la ville en passant sous la dalle du marché, pour rejoindre la Doller, à l’entrée de Bourtzwiller. L’Ill historique passe à hauteur de l’actuelle avenue Kennedy, anciennement quai du Fossé », détaille Bernard Finck.

En faisant la visite des lieux historiques, on est frappé par le manque de mise en valeur de beaux endroits, comme celui situé à l’extrémité du Nouveau Bassin, au niveau du Kinepolis, là où l’Ill et le Steinbaechlein se rejoignent avec une extension du canal du Rhône au Rhin. Au niveau de la SACM coule l’Ill historique, un autre site qui pourrait être bucolique s’il n’était pas encombré de déchets qui flottent là dans l’indifférence générale. « Alors qu’autrefois, ce bras d’eau permettait de refroidir les grands moteurs de la SACM », note le responsable.

Le service des eaux et celui des espaces verts interviennent ponctuellement pour l’entretien des berges, du curage et de la coupe des végétaux aquatiques. Mais la saga de l’eau s’est malheureusement fermée avec l’urbanisation de la ville.


source:
15.08.2012 l'Alsace Sabine Hartmann

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Quand le petit s’impose au gros

Au bout du Nouveau Bassin, l’ancien port industriel, qui desservait notamment la filature Laederich (devenue scène nationale) et les abattoirs (à l’emplacement de l’actuel cinéma Kinepolis), l’Ill réapparaît très discrètement, en bordure d’une bretelle d’autoroute. Difficile de la suivre dans le Mühlenfeld, une enclave agricole qu’elle traverse jusqu’à Illzach. Passée sous l’autoroute A36, elle se jette dans une Doller bien plus large, mais c’est le petit qui s’impose au gros : d’un pont à l’autre, en quelques centaines de mètres, ce qui était nommé Doller est renommé Ill. La rivière martyrisée prend sa revanche. Libérée de la ville, elle se sauve à travers champs, retrouvant rapidement, entre Sausheim et Kingersheim, un cadre serein et bucolique.

src: Olivier Brégeard https://www.lalsace.fr/actualite/2017/07/20/ a-mulhouse-couverte-et-redecouverte